vendredi 16 avril 2010

Une odeur de miel dans le racoin du ciel. Le goût de l'inéluctable. Le faste des restes de table. De la monnaie de singe pour la souche qui s'effrite.

grévistes chez Dupuis & frères, Montréal, 1952


À MICHEL CHARTRAND


Cher camarade,

Ce petit mot pour vous dire, tout simplement, que si je peux espérer devenir quelqu'un dans la vie, c'est à vous que je le dois. Peu d'hommes québécois m'ont marqué comme vous l'avez fait. Je me souviens que mon père fermait la radio quand vous y étiez interviewé, tellement il avait peur de l'idée de liberté que vous incarniez si totalement. Je me souviens aussi de la grève au magasin Dupuis & Frères, des abeilles qui y volaient joyeusement grâce à vous, en ce temps où le syndicalisme était un vrai combat, mené par des chefs qui n'avaient pas peur de mettre leurs culottes. Comparé aux moumounes qui dirigent aujourd'hui les mouvements syndicaux, crisse que c'était stimulant de vous entendre et de vous voir agir, sans compromis ni compromissions, pour l'établissement d'un Québec indépendant et socialiste ! Je rêve de vivre au moins jusqu'à 90 ans, comme vous, ne serait-ce que pour écoeurer ce monde que vous avez combattu, celui des poules mouillées, des crosseurs politiques enchef en sous-chef, des arrivistes, des magouilleurs, des défaiseurs de pays, des traîtres à la nation et à la culture québécoise. Merci d'avoir été là et d'y être toujours. Vous êtes un formidable exemple, le seul à m'être aussi essentiel.

Victor-Lévy Beaulieu
Trois-Pistoles

Vendredi le 16 avril 2010
in Carrefour des Lecteurs, Le Soleil


À l'époque, Dupuis Frères est un symbole pour les Canadiens français, ce qui confère une grande importance au conflit. La majorité des 1 000 grévistes sont des femmes qui reçoivent des salaires modestes. Selon Pierre Vadeboncoeur, l'avocat du syndicat de Dupuis et frères : «Un des éléments déclencheurs (de la crise) est l'arrivée d'un nouvel administrateur Roland Chagnon (...) Le renouveau impliquait le départ de plusieurs employés.» Cet arrêt de travail est marqué par plusieurs incidents, notamment lors des tentatives par la compagnie de relancer ses activités avec des briseurs de grève. C'est d'ailleurs à une de ces occasions que le célèbre boxeur Joe Louis refuse de traverser les lignes de piquetage par respect pour les grévistes. Ces derniers utilisent plusieurs moyens inusités : propagande, intimidation, explosion de bombes puantes, envoi de souris, d'abeilles et de grenouilles dans le magasin. Environ 70 grévistes et sympathisants seront arrêtés par les policiers. Un seul sera emprisonné pour avoir bombardé le maire de Montréal, Camilien Houde, avec des oeufs, lors du défilé de la Saint-Jean-Baptiste. Lorsque le conflit se terminera, le 26 juillet 1952, les syndiqués obtiendront le respect de la formule Rand, des hausses salariales variant entre 4 et 6 $ et la semaine de 40 heures.


sources: Université de Sherbrooke, faculté des lettres et sciences humaines

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